Le W te ment

Milieu de la nuit, le sommeil a fuit. Un bruit a réveillé la grise. Elle n'a pu l'identifier, mais son sommeil lui, n'a point voulu revenir. Elle marche donc le long du ruisseau, gardant une distance raisonnable entre elle et l'eau pour le moment. Ne voulant se risquer à devoir réveiller qui que ce soit en appelant au secours pour cause de noyade imminente.  

A l’affût du moindre mouvement en provenance des arbres et des roches perdues dans la pénombre elle reste attentive, autant qu'elle peut, volant quelques minutes d’endormissement de ça, de là, sans s'en rendre compte. Elle baye aux corneilles, cligne des yeux. Pleure sur sa nuit envolée. Elle baisse l'encolure sur le sol plutôt sec à son goût pour un bord de ruisseau. Arracha une touffe d'herbe solitaire, plus pour s'occuper que pour se rassasier. Les nombreux séjours qu'elle fait au verger lui remplisse l'estomac à coup sûr.

Le souvenir du dieu lui revient. Elle à encore l'impression que cela fut un rêve, ou un cauchemar. Elle n'avait jamais pensé qu'ils existaient réellement, plutôt qu'ils étaient l'invention d'esprits fertiles. Des mythes dont on parlait tellement qu'il finissait par être palpable du bout du sabot. Et pourtant, elle aurait presque pu le toucher ce dieu noir. Celui qui gardait ces terres dont elle avait parfois revendiqué le nom. Il ne lui avait pas prêté un regard. Elle en concluait qu'il s'en fichait. De toute façon, maintenant elles sont à nouveau dominées.

Autocratie a reprit. De façon dédoublé. Elle avait mit un temps à se faire à l'idée de ne plus avoir son cher tyran pour dictateur. Il lui en faudrait tout autant à entrer dans ce nouveau règne. Même si elle devait se l'avouer, le troupeau semblait plus … peuplé. Voir même serein. Elle ne les côtoyait pas vraiment, mais finirait bien par en rencontrer quelques-uns. En espérant juste que ça ne finisse pas en eau de boudin.    

• Malagraph'
  

Elle suit le mouvement d'une libellule, elle aussi réveillée à la mauvaise heure. La gracieuse voltige, part, s'en va, virevolte pour aller de l'autre côté du ruisseau. Disparaît dans l'ombre. Malag' retourne à son chemin, se rapprochant d'un pas sur le côté de l'eau coulante. Coulant sans bruit, si ce n'est celle d'un malheureux poisson qui saute pour la faire mentir. Enfin, ce n'est en soit pas compliqué. Elle soupire.

La voix d'une oiselle la surprend. Elle ne devait pas être assez attentive. Dormant debout. Elle se tourne vers elle. Son regard glisse sur sa silhouette. Elle n'est plus ronde comme une barrique. Cet oiseau qui, il y a peu était si rond que si on le poussait un peu trop fort, roulait jusqu'au bas de la montagne en piaillant. Fine et spectrale, la langue un peu trop abrupte pour une heure si nocturne. Sa gueule de bois n'était donc pas passé inaperçue. Qu'importe.  

L'envie de noyer ma personne dans le ruisseau m'a réveillé. Vous aussi ? Bonsoir.

Elle n'avait aucunement envie de se noyer, mais puisque le thème était la boisson, l'eau du ruisseau venait tout logiquement à la suite. Elle s'en rapprocha d'ailleurs encore un peu. Après tout, elle savait nager et tout cela n'était qu'une fable pour effrayer les enfants. Un dicton passé d'autocrate en autocrate pour garder ce lieu de baignade loin des poulains perturbant et bruyant. Une piscine qui se cache derrière un mensonge spectaculaire. Conçu de fil d'or et de mort.  

• Malagraph'
  

Appeler. Un nom. Si elle voulait, la grise pouvait lui en sortir une panoplie tout entière. Elle avait une boîte, peut-être bien de pandore, mais certainement d'abondance qu'elle ouvrait à chaque fois que son nom lui était demandé ou qu'elle voulait se faire appeler. Enfin lors des présentations. Et apparemment, la jument crémeuse ne souhaitait pas l'appeler vizir. Dommage, la grise aurait pourtant bien apprécié cela. Elle garderait donc les mots doux pour le dictateur à la retraite. Elle regarda franchement la jument, celle qui dirigeait maintenant ce troupeau.

- Interpellez-moi sous le nom de Mala, sinon vizir.

Mention qui la fit sourire. Même si maintenant, elle devait sûrement avoir perdu cette place, qu'elle n'avait jamais vraiment eu. Juste dans l'imaginaire, mais cela lui suffisait et parfois, force d'y penser, les choses se font. La boutade sur le fait de se noyer dans le ruisseau n'avait pas fait mouche et alla se perdre dans l'obscurité. Rejoignant ainsi assurément un troupeau de tirades tué dans l’œuf.
 
Étonnamment beaucoup plus intéressante et de possédant beaucoup plus de matière à travailler, une question pointa le bout de son nez. Anodine comme ça. Mais la grise imaginait déjà la suite de cette conversation nocturne. Elle drapa sa cape, Mata Hari qu'il avait dit. Soit. Elle n'allait pas se faire prier.

- Le jour où j'ai signé un pacte avec le diable. Cela remonte à votre prédécesseur. Et vous, depuis quand vouliez vous en emparer ?  

Et après tout, elle ne mentait même pas. Elle porterait même la signature de ce dernier le reste de sa vie. Elle avait eu de la chance, cette morsure c'était convenablement refermée et elle en broderait les bords avec des mots autant que faire ce peut. Oh non, elle n'irait pas dire que Sorrow l'a mordu. Ou du moins, pas pour la raison pour laquelle il l'a fait. Et peut-être qu'elle ne l’associerait pas à ça. Elle verrait bien où sa langue la mènerait le jour où elle en parlerait. De toute façon, c'est elle qui décidait de tout. Elle porta son attention sur le court d'eau, quittant la dominante des yeux. Elle mourrait presque d'envie de lui demander où elle avait caché la graine que son ventre portait il y a si peu de temps.  

• Malagraph'
  

Watercloset

Malicieusement, son cerveau se met en route, éveillant doucement ses neurones. Debout la-dedans ! La grise s’approche de l'eau pour y boire elle aussi, espérant juste ne pas être happée par un monstre sous-marin sévissant la nuit. Ou pousser à l'eau par l'oiselle, même si cette dernière n'avait aucune raison de faire ça. Le nom de vizir lui arracha un sourire magistral. Heureuse d'être enfin reconnue. Elle sortie son nez de l'eau. Écoutant les paroles de la jument, elle prit un air un peu surpris lorsque cette dernière parla de date.  

- Eh bien ! Vous n'avez pas attendu longtemps après la mort de Sorrow pour vous mettre en quête du trône. Elle laissa passer un ange, ou bien le cadavre du noir avant de reprendre. Mais il faut dire que le troupeau ne s'en porte pas plus mal.

Nul trace de sourire, pourtant, il faut dire que son esprit s'amusait à merveille. La « mort » de Sorrow l'amuserait encore bien longtemps et puis, il n'allait pas mettre les sabots dans le coin avant un moment si elle avait bien compris les relations qu'il entretenait avec son fils. Et elle ne sortait pas d'ici. Même si elle ne serait pas contre un tête-à-tête avec lui dans le verger, parler du bon vieux temps, manger quelques framboises. Chasser les libellules. Bref, elle était contente de l'avoir comme ami. Elle fit mine de réfléchir.

- Toilette … Hum pardon, je pensais qu'avoir des toilettes ou un lieu dédié à ces besoins serait pas mal. Non car j'ai un jour rencontré un étalon semblable à une vache. Réflexion. Ou bien l'inverse. Et cette dernière nommée circus ce soulagé allègrement en plein milieu du chemin. 

• Malagraph'
  

Étoiles et lune se partagent le ciel, se reflétant dans le ruisseau. Elle observe le reflet puis relève la tête. Prend un air tout à fait choqué à la nouvelle que lui annonce Fifa et qu'elle connaît bien plus que personne, elle en porte l'empreinte dentaire et pourrait même aller lui faire faire un dentier sur mesure. Bon elle enverrait la facture à une adresse bidon. Ou à son fils. Elle ouvrit la bouche béate, la tête tournée sur la jument.    

- Ultimement, c'est une jument qui me l'a annoncé. Elle réfléchit. Mon dieu, je l'ai même annoncé à sa fille, elle était toute chose. Elle commença un mouvement de recul. Il faut que je vous laisse ! Je dois lui dire la vérité ! Elle s’arrêta. Mon nom c'est Mala cheftaine  !

Réctifiant l'erreur de la jument crème sur son patronyme d'emprunt et reculant encore du ruisseau elle prit le trot vers une direction incertaine. Non, elle ne comptait vraiment pas aller voir la fille de Sorrow. Si celle-ci était dans le coin. Et pas morte de chagrin. Il est temps de retourner dormir.
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